Une mésange noire vient de passer
Après les insectes, les oiseaux ! Deux organismes d’État (le CNRS et le Muséum national d’histoire naturelle) publient ces jours-ci les mêmes chiffres. Et le constat est sans appel.
En quinze ans, un tiers des oiseaux auraient disparu des campagnes françaises, à une vitesse vertigineuse. L’effet domino. “Logique, non ? Pas besoin d’être chercheur… les moucherons meurent, donc les oiseaux n’ont plus rien à grignoter.”
Pendant des années, on a beaucoup parlé, beaucoup considéré que “oui, bien sûr, il faut sans doute se pencher sur le problème… vous dites que la mésange noire que l’on apercevait dans l’arbre de la cour, on ne la voit plus depuis l’automne dernier ? Sauf que vous savez… j’ai un budget à boucler, moi, Monsieur… Ça ne rentre pas facilement dans un tableau Excel, un oiseau. Pas très numérique, les plumes” !
On a souvenir, enfant, d’accompagner les chasseurs qui remontaient dans les chaumes fraîchement coupés, pour dénicher des volées de perdrix. Depuis plus de vingt ans, c’est une hécatombe : 80 à 90 % des perdrix rouges ont disparu. Les oiseaux meurent, parce que nos campagnes ne sont plus vivables.
Un professeur du Muséum nous en dit un peu plus : “Que les oiseaux se portent mal indique que c’est l’ensemble de la chaîne alimentaire qui se porte mal. Et cela inclut la microfaune des sols, c’est à-dire ce qui les rend vivants et permet les activités agricoles.”
Vous prenez votre voiture, vous quittez la ville, vous marchez à travers un champ et là, vous vous dites : “Voilà, je ne vois rien, mais je suis sur un terrain mortel.” Comme pour les zone irradiées de Fukushima au Japon. Quel terrible constat ! Alors bien sûr que l’on pointe du doigt l’agriculture intensive sensée nourrir la planète… mais à quel prix !
On nous dit que l’on a vu et entendu le week-end dernier, une linotte mélodieuse, friande d’invertébrés à la belle saison et de graines de plantes adventices en hiver, et deux alouettes des champs, près de Meaux.
Et puis là, un petit cri ? Non, rien à voir, c’est un message Twitter sur notre smartphone. Là, par contre, beaucoup d’oiseaux bleus, c’est même le logo de Twitter. Il y a un peu plus de dix ans, quand il a fallu trouver un nom à ce nouveau réseau social, les programmeurs qui travaillaient sur le projet, ont feuilleté les pages d’un dictionnaire. Twist, twit, twitch, twitcher, twitchy... et OK c’est super ! “Le léger chant émis par certains oiseaux”, “excitation, agitation” : Twitter.
En dix ans, on s’est habitué aux punchline limites, aux invectives, aux injures… sur Twitter. On a juste oublié de dresser l’oreille au silence des oiseaux. Ah, une mésange noire vient de passer devant notre fenêtre.