Bises et (re)bises, ou pas ?
Il a fallu du temps pour que l’on casse la distance, que l’on cherche à retrouver ce reflex du monde d’avant. « Bon allez, on s’embrasse, on est tous vaccinés, non ? » Oui, non, pas si simple !
« S’embrasser ou pas ? » On lisait à l’automne qu’une majorité de Français n’est finalement pas très enthousiaste à l’idée de revenir à la bise du matin.
Alors c’est vrai qu’il y avait bien quelque chose de flou derrière ce geste. Un côté, « on n’est pas simplement collègues de travail, on est quasi amis et on partage une forme de complicité, alors on se fait la bise ? »
Et puis, en ces temps où l’attention est de mise, on n’en pouvait plus de ces passages obligés de certains mecs qui te font une bise bien lourde, appuyée, intrusive au point que tu te sens mal à l’aise.
Car qui dit bise, dit gestes des bras, des mains qui te tiennent par les épaules.
« Ça me fatiguait ces mecs qui se rapprochent de toi, prétextant le bonjour. Pas mécontente du plus de bise… » Metoo est passé par là, le rapport à l’autre a bougé.
Avec la pandémie de Covid-19, tout s’est arrêté net, du jour au lendemain.
Terminé les bises au boulot, terminé le boulot sur place. Les recommandations sanitaires et autres incontournables gestes barrières à appliquer.
« Le bon côté, c’est quand même de ne plus être obligé de supporter le parfum et l’haleine de certains. Et je ne te parle pas des barbes et moustaches aux odeurs douteuses… »
Peut-être, enfin de compte, que la Covid-19 a permis de recentrer la bise sur l’intime, le privé, en plaçant le rapport professionnel à une certaine distance.
Cette séquence qui s’achève avait démarré avec Mai 68 et son envie de casser les barrières sociales. Les garçons, les filles s’embrassaient jusqu’à ce que la bise devienne un geste banal dans le monde du travail, ou en tout cas dans certains milieux.
Cinquante ans plus tard, une pandémie mondiale est passée par là et, comme à chaque fois dans l’histoire, certaines pratiques culturelles sont tenues à distance.
Vaccin, bout du tunnel, sentiment de liberté, on pensait voir la lumière depuis cet été. Pourtant, on sent qu’une micro-distance s’est installée entre chacun d’entre nous.
Un je-ne-sais-quoi de fragilité qui risque d’emporter une pratique que personne ne questionnait. Et si c’en était terminé pour longtemps de la bise du matin un peu comme de fumer en voiture, plus personne n’y songe.
En fait, on va penser à s’installer en Bretagne, dans le Finistère, ou quoi qu’il arrive, les gens ne font qu’une seule bise, c’est déjà ça de gagné. Avant la cinquième vague !