Le goût de l’époque
Tout le monde court après. Trouver, traquer, dénicher les tendances du moment. Mais, c’est quoi le goût de l’époque, à un moment où le coronavirus menace de nous priver du goût comme de l’odorat ?
Le goût de l’époque, les artistes le sentent généralement avant les autres. Comme le plasticien Christian Boltanski qui précisait cette idée. « Un artiste, c’est quelqu’un qui pose un Post-It sur quelque chose que tout le monde à sous les yeux, mais que personne ne voit. »
Et ce goût de l’époque, le Fooding l’a senti bien avant tout le monde. C’était il y a un peu plus de vingt ans, et comme pour tout ce qui touche à ce qui infuse dans la société, ça démarre avec la fête et le monde la nuit. Il faut croire que la nuit, nos sens sont en éveil.
En 1999, Alexandre Cammas sent que la cuisine est en train de bouger. Il cherche une rime à « Clubbing » pour créer un hors-série de Nova Mag, le magazine culturel branché de ces années-là. Alors, ça sera « Fooding », autant pour ce qu’il y a dans l’assiette que pour ce qu’il y a autour. Ainsi sort le premier guide, mille adresses et rapidement, c’est le succès. Le terme devient vite synonyme de fusion entre cuisine, art, musique et design.
Aujourd’hui, le Fooding, c’est la cuisine du monde qui devient accessible en quelques clics. Tu peux t’inspirer d’un plat proposé à l’autre bout de la planète et que tu découvres sur ton smartphone. Le Fooding, c’est aussi aller chercher dans les interstices. Repérer un producteur de carottes anciennes. S’arrêter chez des particuliers qui ouvrent une table, manger une sublime focaccia mozzarella dans un food truck près du Faubourg Poissonnière dans le dixième arrondissement de Paris.
En vingt ans, les produits Bio sont arrivés à grands pas. La saisonnalité qui s’impose partout, manger des asperges au printemps. L’attention porté au sourcing, « il vient d’où, ce poisson ? » Et puis les conditions de travail, ne plus accepter comme une évidence de faire quatorze heures par jour, tout ça parce que dans un restaurant… c’est comme ça. Le Fooding a senti tout ça !
La dernière tendance apparue, ces derniers mois avec le confinement, c’est la vente à emporter, le cuisinier qui se transforme en traiteur. Là encore, s’adapter à l’air du temps…
Récemment, Michelin a racheté 100 % du capital du turbulent guide qui avait créé la Bistronomie, et ce qui faisait l’esprit du Fooding est devenu une marque commerciale. Est-ce que la fête serait finie ? Le prochain goût de l’époque reste à découvrir, dans le monde d’après, bien entendu !